covid19

Impact des interventions non pharmaceutiques pour réduire la mortalité du COVID-19 et la charge sur les systèmes de santé

Lien vers l’article original (16/03/20)

Résumé

L’article se penche sur l’efficacité des interventions sociales dans le ralentissement de l’épidémie :

Avec des hypothèses plutôt pessimistes mais plausibles, par un modèle de simulation (basé sur les données des recensements et simulant la propagation dans les structures sociales : foyers, écoles, communautés, etc.) appliqué au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, les auteurs concluent que l’application d’une seule mesure ne parviendrait pas à endiguer une propagation rapide du COVID-19, et qu’une intervention multiple sera nécessaire.

Deux stratégies sont envisagées pour endiguer la propagation. Elles appliquent des objectifs de réduction différents à R0 (mesure du nombre de personnes contaminées en moyenne par une personne malade, estimée sans intervention entre 2 et 2,6).

Stratégie 1 : réduction

La réduction consiste à “aplatir la courbe” afin de retarder et réduire le pic de l’épidémie, mais avec un R0 toujours supérieur à 1 personne par malade. Cette stratégie implique par exemple le confinement des cas suspectés et de leur famille, la mise à distance des personnes à risque et âgées, et la priorisation des traitements médicaux (une fois développés) pour ces personnes. Le fait de laisser une partie de la population tomber malade permet également de créer une immunité collective, supprimant à terme la capacité de transmission du virus, et évitant donc une seconde épidémie.

Selon les simulations, une stratégie de réduction pourrait réduire le pic d’hospitalisation de deux tiers, et réduire les décès de moitié. Toutefois, les systèmes de santé britannique et américain se trouveraient tout de même submergés par le nombre de personnes malades (de l’ordre de 8x le nombre de lits disponibles), et les décès seraient extrêmement nombreux. Les auteurs concluent donc que la stratégie de réduction n’est globalement pas viable.

Stratégie 2 : suppression

La suppression consiste à stopper la propagation du virus en réduisant R0 à moins de 1 personne par malade. Cette stratégie implique des mesures plus lourdes pour la population, dont 4 sont étudiées (distanciation généralisée, isolation des cas, quarantaine des foyers malades, fermeture des écoles). Les simulations montrent qu’une stratégie intense de suppression, combinant les 4 mesures, pourrait faire décliner l’épidémie en 3 semaines, et permettrait de rester en-dessous du seuil critique de lits disponibles.

L’inconvénient majeur de la stratégie de suppression est qu’elle empêcherait la constitution d’une immunité collective. Elle devrait donc être maintenue jusqu’à l’apparition d’un vaccin, perspective estimée à 12-18 mois minimum par les auteurs. Dans le cas contraire, le relâchement des mesures pourrait faire rapidement remonter le nombre de cas de façon exponentielle ; comme ce fut le cas en 1918 dans certaines villes américaines.

La Chine et la Corée du Sud sont les deux principaux pays qui sont parvenus à endiguer la propagation du virus à grande échelle, mais le recul temporel n’est pour l’instant pas suffisant pour estimer si un relâchement des restrictions sociales (entamé depuis quelques jours en Chine) va causer un retour de l’épidémie.

Les auteurs étudient enfin la faisabilité d’une stratégie de suppression intermittente, réimplémentant régulièrement les mesures de distanciation généralisée et de fermeture des écoles, en fonction d’un seuil critique de lits occupés en soins intensifs. Cette stratégie permettrait des retours ponctuels à la normale, mais avec une réactivation régulière des mesures de confinement (environ deux tiers du temps total), pour rester en-dessous de la charge hospitalière critique jusqu’à l’obtention d’un vaccin.

Auteurs

Neil M Ferguson, Daniel Laydon, Gemma Nedjati-Gilani, Natsuko Imai, Kylie Ainslie, Marc Baguelin, Sangeeta Bhatia, Adhiratha Boonyasiri, Zulma Cucunubá, Gina Cuomo-Dannenburg, Amy Dighe, Ilaria Dorigatti, Han Fu, Katy Gaythorpe, Will Green, Arran Hamlet, Wes Hinsley, Lucy C Okell, Sabine van Elsland, Hayley Thompson, Robert Verity, Erik Volz, Haowei Wang, Yuanrong Wang, Patrick GT Walker, Caroline Walters, Peter Winskill, Charles Whittaker, Christl A Donnelly, Steven Riley, Azra C Ghani